JUILLET 1593.                              459
Le mardi sixieme de ce mois, vinrent nouvelles à Paris de la prise de Dreus, et que le Roy avoit donné la vie aux habitans, à la priere de madame sa sœur.
Ge jour, Commolet, qui preschoit aux prieres à Saint-Berthelemi, dit qu'il estoit François, natif d'Auvergne, et de pere et mere françois ; et qu'il eust bien desiré que nous eussions eu un bon roi françois : mais, quelque bruit qu'il courust, que nous n'aurions jamais pour roy qu'un estranger, veu la division qui estoit entre les grands.
Le mecredi septieme de ce mois, le duc de Maienne, troublé de ceste nouvelle election du duc de Guise son nepveu (0, laquelle il voiioit que le légat, joint avec les Hespagnols, les prédicateurs et les Seize, qui ne faisoient une petite compagnie, favorisoient ouverte­ment, tinst conseil depuis quatre heures du soir jusques à minuit : car tout le peuple dc Paris ( au moins la lie qu'on appele, qui fait une bonne part de la ville) le tenoit desja pour son roi. Les Espagnols et Neapolitains l'apeloiént sire; la Sorbonne le vouloit recongnoistre; les curés le preschoient si bien, qu'il n'i avoit fils de bonne mere qui ne l'allast saluer. De lui, voiiant sa royauté assez mal asseurée, monstroit avoir à desplaisir qu'on le saluast et recongneust pour tel. Madame de Guise en rioit; madame de Nemoux s'en oifensoît; madame de Montpensier l'appeloit ce beau Roi; ma­dame du Maine, un petit morveus (*) auquel il/alloit encore bailler des verges. Et ainsi chacun discouroit,
(-) Due de Guise son nepveu : Charles de Lorraine, duc de Guise, fils ainé de Henri duc de Guise, et de Catherine de Clères. (>) Un petit morveus : Le duc de Guise, né le ao août 1571, avoit alors vingt-un ans.
Digitized by